MILLER, GÉRALD, ou Le bénévolat qui mène au travail

Portrait de Gérald Miller

« Il est extrêmement rare qu’une montagne soit abrupte de tous côtés »

(André Gide).

Gérald Miller est originaire de Sainte-Rose-de-Laval, au nord de l’île Jésus, en bordure de la Rivière-des- Mille-Iles. Il naît en fait dans un hôpital montréalais le 16 février 1952. Quatre jours plus tard, sa famille le rapatrie à Sainte-Rose où il passera une bonne partie de sa jeunesse avec ses trois frères dans une vieille maison construite en 1799. Il jouit d’une vision normale malgré une grande sensibilité à la lumière du soleil due à ses yeux bleu pâle.

Un début remarqué à l’école

Gérald fait son cours primaire dans deux écoles de son quartier. Sans le vouloir, il se fait remarquer dès sa toute première journée de classe. En jouant avec ses voisins à la fin de l’après-midi, il s’inflige une vilaine coupure à la main droite en cassant la vitre d’une remise. Résultat : le lendemain, pour son deuxième jour d’école, il arrive en classe avec la main droite complètement bandée. « C’est pas le diable pour apprendre à écrire, ça! », dira ce droitier. Eh bien, il apprend à écrire de la main gauche tout simplement. À la surprise générale, il gagne même un prix d’écriture ! Après trois mois, il doit réapprendre à écrire, de la main droite cette fois.

Dès la fin du primaire, Gérald fait partie de quelques mouvements de jeunesse, dont les populaires Clubs 4-H (Honneur, Honnêteté, Habileté, Humanité), fondés en 1942 et voués à la protection des arbres. Il en conservera une affection profonde et inextinguible pour la forêt.

L’accident

Une fois son primaire terminé, Gérald fréquente l’école Curé-Antoine-Labelle, de la régionale des Mille-Isles, qui offre le cours classique. Il n’a pas encore achevé la première année, Éléments latins, que se produit l’accident qui lui fera perdre la vue. Nous sommes en avril 1965.

Toujours est-il que Gérald, lui, s’intéresse particulièrement à la chimie, qu’il a découverte quelques années auparavant, à un âge peu habituel. Pour une pièce de théâtre, il s’engage à préparer un mélange fumigène afin de créer un nuage de fumée. C’est chez lui qu’il effectue cette opération en apparence banale. Toutefois, celle-ci tourne mal lorsque le contenant de verre où repose le mélange lui explose dans la main droite. Des éclats de verre touchent le côté droit de son corps alors que d’autres atteignent les deux yeux.

On le transporte vite au petit hôpital local et, de là, une ambulance l’amène à l’hôpital Sacré-Coeur de Montréal où il passe trois semaines à subir différentes chirurgies, surtout aux yeux. Puis il revient à la maison, d’où il sortira peu, à moins d’être accompagné.

À la maison

À la fin de l’été, il retrouve un peu de vision dans l’oeil droit. Il bricole alors un système de lentilles montées sur un châssis en bois, grâce auquel il arrive à lire, même les journaux. En octobre, c’est de nouveau la cécité totale, et elle sera toujours là, cinquante ans plus tard.

Comme Gérald va d’une chirurgie à l’autre, il quitte l’école et reste chez lui presque sept ans. Parce qu’il est passionné par l’actualité, sa mère consacre une heure chaque jour à lui faire la lecture de divers journaux. Son père, employé des chemins de fer, lui lit les magazines quand il est de passage à la maison. À cela, ajoutons la radio et la télévision qui, de 1965 à 1971, sont nourries par une actualité très riche: guerre du Viet Nam, guerre des Six Jours, assassinat de Robert Kennedy et de Martin Luther King, crise d’Octobre, etc. Afin de ne pas perdre tout contact avec l’école, Gérald aide chaque soir son petit frère à faire ses devoirs. Il se fait lire telle ou telle page du manuel et est en mesure de trouver la solution à tel ou tel problème.

Retour aux études

En 1971, il a 19 ans quand il retourne aux études et s’inscrit à l’Institut Louis-Braille, de Longueuil, où rares sont les élèves plus âgés que lui. Pensionnaire durant la semaine, c’est sa mère qui assure l’aller-retour en voiture. Tout en terminant sa première année du secondaire, il fait sa 2ième, mais s’y ennuie un peu, trouvant le programme trop facile. À sa demande, il passe en novembre en 3ième année. Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Au début de décembre, Gérald obtient de ne plus aller en classe. Malgré certaines hésitations du directeur des études, Oscar Guindon, il s’installe dans la salle d’étude, où il passe à travers le reste de la matière de la 3ièm et s’attaque à celle de la 4ième, aidé en cela par l’un de ses frères qui enregistre ses livres sur rubans magnétiques. Conséquence : en janvier 1972, il gravit un autre échelon et se retrouve en quatrième année du secondaire. Voilà un jeune homme bien pressé. Les années passées à la maison lui ont fait prendre du retard, aussi met-il les bouchées doubles. De septembre 1971 à l’été 1972, il règle à sa façon la question du secondaire. Il se sent maintenant prêt à passer tout de suite au cégep, sans la 5ième année du secondaire, ainsi que nous le verrons plus loin.

Dès son premier jour à Louis-Braille, Gérald découvre le braille pour lequel il conservera un amour indéfectible. Cependant, apprendre le braille à 19 ans constitue selon lui un autre handicap. Pourquoi? Il y a d’abord son âge et le fait que sa main droite ne s’est pas remise tout à fait de l’explosion survenue en 1965. Elle a bien sûr perdu de la sensibilité. Apprendre le braille pour Gérald, c’est d’abord un exercice de mémoire; le plus difficile reste la détection des points au toucher. Gérald comprend qu’il ne sera jamais un grand lecteur de braille, n’empêche qu’il le maîtrise en deux mois.

En janvier 1972, il reçoit une canne blanche de l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA), mais les 45 minutes que dure le cours de mobilité dans la neige ne font pas de lui un expert de la canne. C’est néanmoins un pas de plus vers l’autonomie. C’est au cégep qu’il aura l’occasion de perfectionner sa technique. À la fin de son année à Louis-Braille, il obtient la permission improbable d’aller avec des amis à une brasserie toute proche pour y boire « une grosse O’Keefe ».

Cégep

Gérald se retrouve à l’été 1972 au cégep Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse, inscrit en droit, même s’il n’y a pas de véritables cours de droit. Il lui faut en même temps compléter sa cinquième année du secondaire par un cours intensif en mathématiques. Il est le seul handicapé de la vue parmi 2000 étudiants, dont certains lui servent de guides pour explorer les lieux. À peine arrivé, il se joint à l’exécutif de l’association étudiante. Il pousse même la témérité jusqu’à présider sa toute première assemblée générale face à 700 étudiants, et ce, sans aucun document devant lui. Chose certaine, sa performance le fait connaître et lui procure des lecteurs bénévoles. Il collabore à la rédaction du journal étudiant, publié chaque semaine, et dont il utilise le local pour taper ses travaux avec une machine à écrire électrique IBM. Qu’il le veuille ou non, il ne passe pas inaperçu avec sa canne blanche et ses verres fumés.

« Le cégep, c’est un lieu de liberté », affirmera Gérald qui y passe deux années « idylliques ». Ou presque, parce qu’il y a une ombre au tableau : les filles ! Gérald prend conscience du fait que sa cécité totale rend complexe l’exercice de la conquête, même si le cégep baigne dans une atmosphère de sexe. Il est connu, certes, mais il est aveugle et représente donc « un moins bon parti ». Il y trouve quelque succès, mais c’est toujours la même chose: il faut faire plus d’efforts pour atteindre ses objectifs. Heureusement, il y a les études et Gérald est un bourreau de travail, très en demande lors des travaux d’équipe.

Il décroche un emploi au cégep même, au sein du Comité collégial d’information. L’une des tâches consiste à rencontrer des élèves qui achèvent leur secondaire afin de leur parler de la vie étudiante au cégep.

À l’origine du RAAQ

À l’été 1974, Gérald fait de la transcription en braille pour l’Institut Nazareth. C’est cet été-là que l’Association des handicapés visuels étudiants du Québec convoque un congrès visant à fonder ce qui deviendra en janvier 1975 le Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec (RAAQ). Le congrès se tient à l’Institut Louis-Braille. Nous reparlerons plus loin du RAAQ. Une certaine Jocelyne Richard (voir sa biographie), membre de l’Association, deviendra une bonne amie de Gérald.

Université

S’il n’avait pas perdu la vue, Gérald aurait voulu être ingénieur en électronique, en résistance des matériaux ou quelque chose comme ça. Devenu aveugle, il se tourne vers le droit parce qu’il se dit « épris de justice ». Nous retrouvons Gérald, à l’automne 1974, inscrit à une licence en droit à l’Université de Montréal, licence qu’il mettra quatre ans à compléter et pour laquelle il a une montagne de documents à lire. Il habite un tout petit appartement, son premier, près de l’Université, rue Côte-des-Neiges. L’hiver, le trajet à parcourir dans la neige lui semblera parfois plus long qu’il ne l’est en réalité. Il rencontre sur le campus d’autres personnes handicapées de la vue qui, comme lui, sont confrontées à l’absence de services adaptés à leurs besoins. En plus d’y étudier, Gérald sera embauché un été par l’Université de Montréal à titre de technicien audio et sera chargé de vérifier la qualité d’enregistrement de livres sur bobines magnétiques.

Chien-guide

Après sa première année universitaire, au printemps 1975, Gérald se rend à Long Island, en banlieue de New York. Il y passe un mois et en revient avec un chien-guide, un labrador de 95 livres. L’anglais parlé de Gérald s’avère encore assez pauvre, mais il s’améliore grandement durant les semaines passées aux États-Unis car, au centre d’entraînement, il est le seul francophone. Une fois à Montréal, le chien reçoit des consignes à la fois en anglais et en français. Par exemple, Gérald lui demande s’il veut aller « jouer outside »: le chien court alors vers la porte, prêt à sortir. De toute évidence, il a compris.

Comment loger le maître et son chien-guide dans un appartement minuscule ? Réponse : « C’est l’appartement où mon chien a appris à reculer », dira Gérald. Ce dernier aura beaucoup de difficulté, pendant les cinq premières années, à faire accepter le chien dans les restaurants, l’autobus, le métro, etc. C’est une situation qu’ont vécue d’autres personnes qui se sont déplacées avec un chien-guide dans les années ‘70 et que nous avons évoquée ailleurs.

En 2004, presque trente ans plus tard, Gérald décidera de ne plus avoir de chien-guide. Selon lui, vivre en ville rend l’utilisation de cet outil, pourtant exceptionnel, difficile et contraignante. Mais les marches de plaisir avec le chien lui manqueront. Quoi qu’il en soit, ses besoins ont changé. Ses amis peuvent le transporter d’un endroit à l’autre, tous ayant aujourd’hui une auto. De plus, le transport adapté facilite grandement ses déplacements quotidiens. Bref, la canne blanche lui suffira désormais. Pour lui, lorsqu’une décision s’impose, il ne faut pas hésiter à la prendre, même si elle est déchirante.

Une nuit au Château Frontenac

Des amis et Gérald fondent le Mouvement pour les chiens-guides en 1974. Ils travaillent en étroite collaboration avec la Ligue des Droits de l’Homme, aujourd’hui Ligue des Droits et Libertés. En 1977, ils se rendent à Québec afin de défendre leur cause devant une commission parlementaire. Comme ils sont plutôt fauchés, Gérald appelle l’un de ses oncles qui occupe un poste important au Château Frontenac. Non seulement les trois amis et deux chiens-guides peuvent y dormir sans souci mais, le lendemain, le chauffeur du Château les amène en limousine à la commission parlementaire…

Il faudra se rendre jusqu’en février 1979 pour qu’entre en vigueur un amendement à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, cet amendement étant largement le résultat de l’action de Gérald et d’un copain à lui, Michel Langlois. La Charte interdit dorénavant la discrimination fondée sur le handicap ou sur l’utilisation de quelque moyen pour y pallier. Gérald est particulièrement fier du fait que, pour ce qui est de l’année 2014, 35 % des plaintes reçues à la Commission des Droits de la Personne du Québec invoquent ce motif interdit de discrimination. C’est là une réussite qu’il estime extrêmement valorisante, surtout qu’il y a travaillé parallèlement à l’obtention d’une licence en droit.

Le Barreau

Sa licence en droit obtenue en 1978, Gérald entre à l’École de formation professionnelle du Barreau, qui équivaut à la maîtrise. Mais il se heurte à un problème de taille. Comment faire enregistrer des milliers de pages avant l’examen à la fin de chaque mois ? Il reçoit toujours les cassettes après l’examen, donc, trop tard. Par ailleurs, trouver la bonne information sur des centaines de cassettes, durant un examen, relève de la prouesse. Nous sommes loin de l’informatique actuelle. Résultat : Gérald abandonne l’École du Barreau à la deuxième année, au début de 1980. Même s’il n’est pas responsable des circonstances qui ont joué contre lui, il vit ses études au Barreau comme un échec. Mais on ne doit pas laisser un échec entraîner la paralysie. Heureusement, sa licence en droit, elle, reste acquise et lui servira toujours.

Son amie Jocelyne Richard dira plus tard qu’il fallait une grande détermination pour entreprendre des études au Barreau, et ce, sans aides visuelles adéquates. Elle parlera de sa « mémoire phénoménale », mais la mémoire a ses limites. Bien que très exigeant envers lui-même, Gérald, selon elle, s’est montré lucide, a été capable d’évaluer la situation et en a assumé les conséquences.

Enseignement

Dès la fin de 1980, sans diplôme en pédagogie, mais avec quelques bons contacts hérités de son bénévolat, il devient enseignant de français et de mathématiques à l’école Champagnat de Montréal, où ses élèves sont des adultes handicapés visuellement.

Il enseigne aussi le braille aux voyants, notamment à des étudiants en éducation spécialisée ainsi qu’aux futurs professeurs itinérants qui vont soutenir l’intégration des enfants vivant avec un handicap visuel dans les écoles dites régulières. Ce chargé de cours, qui enseigne à temps plein pendant presque cinq ans, sera dix ans à Champagnat. « J’ai adoré ça », affirmera Gérald.

Milieu de la déficience visuelle

Dans les dernières années de son séjour à Champagnat, Gérald commence à offrir ses services à titre de travailleur communautaire dans le milieu de la déficience visuelle et ailleurs. Il lui arrivera d’occuper deux ou trois emplois en même temps. Certains contrats ne durent que six mois ou sont à temps partiel.

Il est ainsi directeur général du Regroupement des aveugles et amblyopes du Québec, section Montréal, qui allait devenir le Regroupement des aveugles et amblyopes du Montréal métropolitain (RAAMM). Il dirige également le RAAQ. À la demande de son président, qui vient de perdre son directeur, Gérald va jusqu’à assumer, pendant plus de six mois, la direction des deux organismes, logés fort heureusement au même endroit.

Nous le retrouvons aussi à l’Association des sports pour aveugles de Montréal (ASAM) et à l’Association des sports pour aveugles du Québec (ASAQ). La clientèle de ces organismes est plus jeune que celle du RAAMM. Gérald doit, entre autres choses, trouver des sources de financement. Il se sert alors du Versabraille 2. Ce nouvel appareil contient un ordinateur qui affiche le texte en braille sur une ligne de vingt caractères. Signalons que Gérald travaille quelque temps à la Magnétothèque, aujourd’hui Vues et Voix, après y avoir été chroniqueur juridique de façon bénévole.

Il reviendra au RAAMM, d’abord comme communicateur juridique dans les années ‘90, puis comme directeur général intérimaire en 2007-2008. Quant au RAAQ, il le dirige de nouveau depuis 2011. Comment y revient-il ? La chose se passe ainsi: pendant une réunion du conseil d’administration du RAAQ, on lui téléphone pour lui en offrir la direction, qu’il accepte aussitôt.

De 2011 à janvier 2016, moment où il quitte le RAAQ, il y consacre l’essentiel de son temps. Il consent à l’occasion à présider des assemblées générales (Cercle Ville-Marie, Hiboux de Montréal, etc.) ou à réviser des règlements généraux.

Bureau des conférenciers

À la fin des années ‘70, Gérald se joint à des étudiants handicapés au sein du Bureau des conférenciers, où il est le seul handicapé de la vue. Le BDC s’est donné pour mandat d’aller rencontrer les jeunes dans les écoles et de les sensibiliser au handicap physique. Gérald, lui, donne des conférences afin d’inciter les personnes handicapées à s’opposer à la première version du projet de loi 9, sur la personne handicapée au Québec.

NIC

Au milieu des années ‘80, Gérald devient directeur de la formation et de l’administration à « Nous nous intégrons en commun » (NIC), un organisme ayant pour clientèle des handicapés physiques. En plus de défendre leurs droits, entre autres à des services à domicile de qualité, le NIC leur offre des activités de formation.

Travail autonome

Après avoir travaillé aussi à la Fédération québécoise pour la justice et dans une clinique juridique carcérale, Gérald opte, À la fin des années ‘90, pour le travail autonome, en rédaction et révision de texte. Il lui est possible de travailler à la maison grâce à l’arrivée du courriel. Toutefois, il lui faut accepter les contrats quand ils lui sont offerts. Point de 9 à 5 ici. Après une douzaine d’années de ce régime, il ressent le besoin de faire autre chose, de sortir de chez lui. Il retourne alors au RAAQ dont nous avons parlé précédemment.

Bénévolat

Il n’a pas encore achevé sa licence en droit qu’il est bénévole à la Ligue des droits de l’homme. Gérald est pendant cinq ans au conseil d’administration, au comité exécutif et siège à de nombreux comités sectoriels. Il a la chance inestimable d’y travailler avec Simonne Monet-Chartrand, « une femme exceptionnelle, de qui j’ai beaucoup appris », dira-t-il. Il a énormément apprécié ce bénévolat, d’autant plus qu’il l’accomplissait dans un milieu très stimulant.

Dès le début des années ‘80, pendant cinq ans, il donne un coup de pouce à un organisme logé à Ottawa, CLAIR Association of the Disabled, qui dispense de l’information juridique. Seul bénévole francophone, Gérald met à profit sa licence en droit et s’y occupe de rédaction, d’organisation, d’administration, de trésorerie et de recherche de financement. Des rencontres ont lieu régulièrement à Ottawa, Toronto et Montréal. Évoquant cette période de sa vie, Gérald parlera de l’importance de développer un bon réseau de contacts. Or le bénévolat représente, selon lui, un excellent moyen d’y parvenir. Les cinq ans passés à CLAIR le mèneront tout droit au Programme de contestation judiciaire, où il travaillera quinze ans sur des dossiers constitutionnels.

Programme de contestation judiciaire

Dans la Charte canadienne des droits et libertés, enchâssée dans la constitution en 1982, on trouve l’article 15, portant sur la discrimination. Le Conseil canadien du développement social recommande au gouvernement fédéral de mettre sur pied le Programme de contestation judiciaire, qui servira à financer les citoyens qui veulent poursuivre ce même gouvernement, qui sont démunis et qui font partie de minorités susceptibles d’être discriminées, par exemple les personnes handicapées. On crée le Comité des droits à l’égalité qui étudie les demandes de subventions.

Gérald en devient membre, pour un mandat non renouvelable de deux ans, mais y reste de 1987 à 2002. Il reçoit une abondante information sur cassettes et utilise un preneur de notes. Le Comité tient régulièrement des réunions, chaque fois dans une ville différente au Canada. Gérald doit donc prendre l’avion fréquemment. « Voyager seul, quand on est complètement aveugle et toujours dans des villes différentes, c’est quand même un peu insécurisant, dira-t-il. Quand on débarque à l’autre bout, il faut se dépatouiller.»  Son chien-guide ne peut régler tous les problèmes. Gérald avouera être content d’avoir voyagé seul (un jour, il se rend à Yellowknife !), mais préfère désormais voyager accompagné.

Fierté

L’une des choses dont Gérald est le plus fier, c’est d’avoir obtenu, à la fin des années ’70, un amendement à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Gérald n’est pas peu fier, non plus, d’avoir en trois ans doublé le financement du RAAQ, sans parler de certains dossiers qu’il croit avoir fait avancer depuis 2011. Pourtant, ce n’est jamais gagné d’avance. D’abord parce que le RAAQ peut bien faire toutes les représentations requises dans tel ou tel dossier, il n’en reste pas moins que les décisions ne relèvent pas de lui. Ensuite parce que les moyens financiers dont dispose le RAAQ s’avèrent sérieusement limités, surtout dans les années 2010 où les sources publiques de financement se tarissent. Finalement parce que le milieu de la déficience visuelle est en réalité un petit village, mais étalé à la grandeur du Québec, ce qui ne facilite ni les communications, ni les rencontres.

« D’après Jocelyne Richard, Gérald a le sens de la communauté. Sûr de lui sans être narcissique, méticuleux, il étudie à fond ses dossiers, n’hésite pas à faire entendre sa voix si la situation l’exige, sait s’entourer des bonnes personnes et peut même se montrer visionnaire. »

Retraite

Bien que travaillant depuis une quarantaine d’années déjà, Gérald n’imagine pas tout arrêter du jour au lendemain. Loin de lui l’idée de consacrer sa retraite à se bercer sur son balcon. Il aimerait écrire, mais ne sait pas encore quoi exactement. Actuellement, il n’a pas vraiment le temps de se consacrer à la cuisine et à la menuiserie, deux passions pourtant très présentes dans sa vie. Par ailleurs, il s’intéresse beaucoup à la lecture, à l’information et aux documentaires à la radio et à la télé. Toujours intéressé également par les sciences, Gérald fait l’éloge d’Internet : « La plus grande bibliothèque du monde et elle nous est en grande partie accessible », affirme-t-il. Souriant, il ajoute: « On vit à une belle époque. Il y a des côtés où la montagne est accueillante pour nous »

Attention !

En terminant cette biographie, nous vous offrons une galerie de photos. Elle s’adresse aux parfaits voyants, aux semi-voyants, aux personnes conservant une vision modeste et aux aveugles. Il est un peu complexe de concevoir une galerie de photos pour une telle démographie. Voici donc le mode d’emploi :

Si vous avez l’usage de la vue et que vous utilisez une souris, il vous suffit de cliquer sur une photo, et alors, la galerie sera remplacée par une diapo grande format, où les photos se succéderont au rythme d’environ 5 secondes. Pour revenir à la galerie, cliquez sur l’icône X, en haut à droite.

Si vous disposez d’une vision modeste, si vous utilisez JAWS, si peut-être vous souhaitez faire une présentation à des amis voyants, alors suivez les consignes qui suivent. Chaque photo est agrémentée d’un LIEN GRAPHIQUE, visible et audible uniquement par les utilisateurs de JAWS. Faites ENTER sur ce LIEN GRAPHIQUE, et alors, la galerie sera remplacée par une diapo grande format, où les photos se succéderont au rythme d’environ 5 secondes. Pour revenir à la galerie, appuyez sur ÉCHAPPE.

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